« At some point must be a place of maximum intensity » écrivait Louis Kahn en 1959.
- Jusqu’à un certain point… nous pensons (encore et toujours) de même. Dans le cas du périmètre A de Malley Gare, c’est une évidence qui s’impose alors que l’image du plan de quartier se base sur des rapports de poids entre éléments coulissant librement les uns face aux autres.
- Entre ces constructions de natures diverses et de poids variables apparaissent des espaces petits ou grands, tendus ou distendus, tous issus d’une forme de négociation, de dialogue ou de connivence entre bâtiments.
- Les bâtiments eux-mêmes ne sont pas en reste. Ils doivent leur existence à un état d’équilibre subtil polarisé d’est en ouest, parallèlement aux voies ferrées. Cet équilibre est appelé à évoluer au gré des investissements dans le secteur, donnant vie à un quartier dynamique.
- Le projet veut révéler le potentiel d’un tel principe urbain, à la fois musclé, souple et tolérant. A l’échelle de l’îlot A, il propose un groupe de 3 bâtiments complémentaires capables d’entretenir des relations de voisinage d’une très grande intensité.
Forme urbaine
- 3 formes fortes partagent complicité et proximité en toute indépendance.
- A1 est la plus grande. C’est ce qui lui permet d’être à l’aise à proximité immédiate des voies ferrées, offrant protection à son voisinage. Sa silhouette se détache sur le ciel, laissant deviner un contenu mixte (logements, hôtel, commerces). A la différence de ses voisines, A1 s’inscrit dans le grand paysage lausannois. Elle assume ce rôle avec force et sérénité.
- A2 ne cherche pas à rivaliser avec son imposante voisine. Elle s’avance légèrement sur la place de la Coulisse mais conserve un profil bas. Sa forme en enclume inversée provient directement du programme logé à l’intérieur : un socle public et des étages privatifs.
- A3 occupe une situation en retrait de ses voisines mais bénéficiant d’un important dégagement face au Centre intercommunal de logistique (CIL). Là aussi, la forme suit la fonction : outre l’accès principal au sous-sol, son socle accueille des bureaux tandis que le volume en retrait d’attique est dévolu au centre médical.
Caractère
- Le projet s’inspire du passé industrieux du site en proposant une image forte, rude mais sophistiquée dont l’imaginaire est à chercher du côté de la ville américaine et des zones d’entreposage industriel. Les éléments saillants du contexte et de son histoire, le gazomètre, le viaduc ferroviaire et de façon plus générale, un certain pragmatisme empreint d’efficacité constructive ont inspiré la facture des trois édifices de l’ilot.
- Chacun des trois bâtiments relate, à sa manière, un récit de bâtisseur. Les façades proposées ont en commun une épaisseur constructive qui accroche la lumière et le regard par des mises en œuvre qui renvoient au rail, à la production industrielle, à la répétition du même. La tour A1 assume avec conviction sa verticalité et sa mixité programmatique. Des éléments verticaux d’échelle colossale en béton rugueux accrochent la lumière et lui confèrent une plasticité sculpturale. Des horizontales marquées décomposent le volume et introduisent une complexité de lecture nécessaire. La résille en métal galvanisé du bâtiment A2 introduit une échelle plus réduite, celle de l’atelier, de la construction métallique artisanale à même de qualifier la future place de la Coulisse. L’ossature bardée de briques jaunes du bâtiment A3 évoque les immeubles d’ateliers et d’activités facilitant la transition vers l’ouest et la déchèterie.
- La mixité de programme a inspiré des objets dont la robustesse sera capable d’accepter confortablement les variations d’usage à venir aussi bien que les mutations du tissu bâti avoisinant : formes fortes pour contexte mouvant.
Espace public
- La place de la Coulisse occupe une situation charnière dans le futur quartier. Elle procure une dilatation précieuse dans son dispositif de « coulisses » longitudinales tout en offrant la possibilité d’un parcours transversal par l’axe culturel qui relie le parc du Gazomètre à la patinoire via le futur passage sous voies.
- Située juste devant le lot A, entre l’avenue de Malley et le chemin des Bouchers, au débouché du passage sous voies ferrées venant de la patinoire, la place de la Coulisse offre une belle respiration sous couvert végétal dotée d’un grand plan d’eau. Ce plan horizontal, disposé au cœur d’une clairière, s’affranchit de la déclivité naturelle de la place grâce à un muret, créant une généreuse assise de 50cm de haut dans la partie la plus basse.
- L’axe culturel fait apparaître l’eau sous différents aspects : dans le parc du Gazomètre, elle est traitée de manière « naturelle » et libre sous la forme d’un grand jardin humide inondable assurant la rétention des eaux de pluies du quartier ; côté ville en revanche, sur la place de la Coulisse, elle se domestique sous forme d’un grand bassin ornemental reflétant le ciel et la ville alentour.
- L’Avenue de Malley respecte le caractère décontracté des bandes de végétation alternées prévues pour l’ensemble du quartier.
- Du côté des voies CFF, en prolongement du chemin des Bouchers, une venelle permet au piéton de contourner ou de traverser l’îlot A de manière fluide.
- L’îlot A est doté de deux traversées piétonnes desservant l’essentiel des programmes. Lieux de passage, de rencontre et de vie, elles sont caractérisées par une forte densité d’usages. Une placette plantée d’un mail d’arbres articule l’avenue de Malley avec le cœur de l’îlot. Des coulisses plantées et équipées assurent une transition entre minéral et végétal par un matériau plus perméable, permettant d’infiltrer et de récolter les eaux de pluies. Ces bandes perméables peuvent s’élargir ponctuellement pour accueillir un mobilier plus conséquent.
- Le passage inférieur sous voies CFF s’inscrit dans la logique directrice des coulisses parallèles aux rails en intégrant la rampe le long du mur de soutènement. Cette disposition permet d’aménager un généreux emmarchement-gradin qui répond à l’échelle du contexte tout entier pour assurer le lien avec le quartier situé de l’autre côté des voies. Un escalier menant aux quais complète le système.
Programme
- Comme mentionné plus haut, le programme se répartit entre 3 objets indépendants : A1, A2 et A3
La proximité de ces 3 objets leur permet de profiter d’un espace de cour commun et de partager le même accès au parking via des connexions souterraines.
La tour A1 s’organise comme suit :
• Le rez accueille le lobby de l’hôtel et un restaurant qui orienté vers la place de la Coulisse. L’accès aux logements se fait depuis la venelle intérieure, tout comme celui du bar/brasserie panoramique, . L’entrée à l’hôtel dispose d’un couvert sur cour, juste en vis-à-vis de l’arcade couverte du bâtiment A2.
• Les étages 1 à 7 sont occupés par l’hôtel.
• Les étages 8 à 19 accueillent des logements à loyer libre distribués en éventail autour d’une cage d’escalier centrale qui profite de la lumière du nord.
• Au 18e étage prend place un bar/brasserie. Passé le dispositif d’entrée, un espace en double hauteur accueille les visiteurs le temps d’une bière de fabrication locale ou d’un hamburger dégustés en plein ciel. Un lieu de vie contemporain mais faisant référence au passé industriel du lieu et de ses abattoirs.
• Au 19e étage les locaux techniques occupent l’angle nord/ouest.
• Le sous-sol est occupé par des caves, le stockage et des locaux techniques. Il permet en outre un accès direct au parking souterrain du bâtiment A3.L’immeuble A2 se décompose de la manière suivante :
• Un rez commercial plein répond à l’Avenue de Malley et à la place de la Coulisse, doté d’une arcade couverte donnant sur la venelle arrière face à l’hôtel.
• Les étages 1 et 2 disposent d’appartements traversants dotés de séjour/cuisine de grande hauteur ouverts sur les espaces publics principaux
• Les étages 3 à 5 reçoivent des logements en PPE traversants dotés de balcons en double hauteur sur l’Avenue de Malley.
• L’accès aux logements se fait depuis la placette ainsi que depuis la venelle intérieure.
• Au sous-sol, caves et parking accessible depuis le 1er sous-sol du bâtiment A3.Le bâtiment A3 se décompose ainsi :
• Un rez commercial (pharmacie) sur l’Avenue de Malley doté d’une arcade couverte sur cour et protégeant les accès au centre médical et aux bureaux.
• L’entrée du parking se fait depuis l’Avenue de Malley face au CIL.
• Le garage à vélos est situé en prolongement de l’entrée du parking.
• Les étages 1 à 3 accueillent des surfaces administratives.
• Les étages 4 à 7 reçoivent le centre médical.
• Au sous-sol, parking général de l’îlot ayant une profondeur d’excavation limitée, connecté par le 1er sous-sol à la tour A1 (accès piétons voire livraisons) et à l’immeuble A2 (accès autos voire livraisons).
Flux
- Le choix volumétrique du projet est celui de la fluidité : des bâtiments indépendants qui laissent l’usager se déplacer librement entre eux et qui laissent des relations s’établir entre eux au gré des preneurs.
- Les flux de mobilité douce (piétonne, vélos) sont donc faciles à assurer dans toutes les directions.
- A ce stade de la réflexion, les vélos venant de l’Avenue de Malley contournent la place de la Coulisse pour rejoindre le chemin des Bouchers.
- Les vélos accèdent au garage à vélos depuis la placette côté voies, en prolongement de la ruelle des Bouchers.
- Les véhicules de livraison ainsi que les automobiles privées accèdent au parking souterrain depuis l’Avenue de Malley. Les livraisons peuvent être distribuées depuis le sous-sol ou depuis les accès de surface selon les horaires.
- Plusieurs emplacements complémentaires de stationnement pour 2 roues sont disposés en surface.
- L’accès des pompiers est assuré à tous les bâtiments depuis les diverses rues et places.
Construction / matériaux façades
- Pour les 3 bâtiments, les principes constructifs généraux sont très simples : la verticalité et l’orthogonalité des façades rend possible une répétitivité des plateaux donc une bonne rationalisation de la construction (réduction des coûts et des délais), un faible volume d’excavation, des structures porteuses en béton armé, du béton recyclé partout où la statique le permet.
- Des façades largement vitrées dans les limites admises par le respect des contraintes énergétiques, à la fois rationnelles expressives : • Bâtiment A1 : façade autoportante en éléments de parement préfabriqués d’une pièce teintés dans la masse aux oxydes de fer, menuiseries bois-alu et stores à lamelles de teinte bronze. • Bâtiment A2 : façade autoportante en éléments d’ossature métallique galvanisée, fenêtres en aluminium, stores à lamelles, toiture végétalisée sur l’arrière, panneaux solaires sur le toit. • Bâtiment A3 : façade en briques klinker claires autoportantes avec parapets en métal de teinte bronze, fenêtres en bois-alu éloxé bronze à l’extérieur, toiture partiellement végétalisée.