Machine Habitée
Dans le cadre d’un exercice sur l'effondrement, le projet s’inscrit dans les enjeux d’une possible chute de la société industrielle et de la mondialisation. Dans un premier temps, il est important de définir une position claire face au mouvement écologique actuelle. En effet, les termes tels que durable, soutenable, subsistance, autosuffisance … participent au flou constant qui perd le citoyen dans une consommation responsable au profit d’une économie “verte”, appelée aussi “greenwashing”.
Cette “fin” de la société occidentale telle que nous la connaissons serait provoquée par des changements climatiques et par l’aboutissement du pétrole bon marché. L’ensemble de ces recherches scientifiques converge vers un avenir assez inquiétant. Pour cela, le projet a pour but de développer un imaginaire afin de dégager de nouveaux modes de vie désirables et de stimuler une transition sociétale. Le processus du projet est donc une étude sociologique et sa traduction architecturale.
Plus concrètement, ce projet part de la dépendance du pétrole sur le système alimentaire européen en prenant pour cas d’étude le Pallotteland. Cette région située au sud-ouest de Bruxelles se caractérise par une haute fertilité des sols. La carte ci-dessus montre une distance régulière entre les infrastructures agricoles datant du 19e siècle. Le passage au 20e siècle, c’est-à-dire à la motorisation des machines agricoles, développe un nouvel usage de cette maille. Grâce aux énergies fossiles, un agriculteur passe de 2ha cultivable à 30ha ce qui engendre une spécialisation des fermes. Alors que toutes les activités liées à l’agriculture se passaient dans une seule et même ferme, actuellement, l’une produit le fourrage pour le bétail d’un éleveur et lui vend son purin par la suite. La carte ci-dessous représentant la même zone, montre que l’élevage, le fourrage et l’agriculture se concentrent individuellement à certains endroits alors que le tissu agricole reste uniformément réparti sur le territoire.
Le cas d'étude est une ferme du 19e siècle et se base sur le postulat d’une disparition du pétrole où toutes les activités agricoles seraient reconsidérées dans la ferme. La première étape du processus a été de réorganiser les terrains agricoles se limitant à la mi-distance des autres fermes, reprenant le parcellaire actuelle et se basant sur le système Van Thunen. Les cultures journalières se trouvent directement autour de la ferme, suivie des cultures plus indépendantes pour terminer sur les pâturages.
La ferme datant du 19e est une typologie à cours dont une est un jardin à la française dédié aux habitants et une autre est productive. Suite à l'augmentation des rendements due à la révolution verte, des hangars industriels ont été accolés afin d’agrandir les anciens. Par après, l’apparition des machines agricoles conséquentes a engendré la construction d’un hangar industriel plus grand et complètement détaché de l’ancienne ferme pour que l’accès des grandes machines soit facilité.
La réorganisation de la ferme implique le démantèlement des hangars préfabriqués, car le projet se limite à la dalle de béton sur laquelle sont disposés les différents bâtiments pour éviter de détruire plus de terres agricoles. Et d’autre part, parce qu'ils sont faciles à démonter et à réemployer. Les nouvelles constructions s’implantent de manière à former d’autres cours, où certaines productives et d’autres enrichissent la va vie communautaire.
Les bâtiments sont dessinés afin garder un confort de vie actuel tout en revenant à des technologies vernaculaires, dites “low-tech”. Plus concrètement, à l’approche de l’hiver, cette machine à habiter se remplit en toiture et en façade avec de paille. Une fois isolé, le bétail doit être rentré et chauffe les habitations se trouvant au premier étage. Au fur et à mesure de l’hiver, la paille est consommée par les animaux qui sont mis en pâturage au printemps.
Cette temporalité constitue un écosystème artificiel, mais n’est pas envisageable sans considérer l’aspect sociologique. En effet, il est inimaginable de proposer à des familles contemporaines de vivre au-dessus des vaches et ensevelis sous la paille. Cependant, la répétition de ce système à court couplé avec un jeu de demi-niveau, où les cours de loisir sont à demi hauteur, il est possible de rentrer chez soi d’un côté du bâtiment et faire rentrer les animaux par une cours productive. Ce jeu offre une séparation des activités agricoles avec le quotidien et donc de développer un imaginaire plus agréable dans cette transition.