Construction d’un Pole de Restauration à l’ENSAM de Cluny
L’enceinte de l’Abbaye de Cluny dessine un paysage fini, installé dans le calme et l’histoire. Sa silhouette ne réclame en apparence aucune modification. Seule, la nécessité d’un nouvel usage autorise la greffe d’un élément étranger.
Le pôle de restauration de l’ENSAM (Ecole Nationale Supérieure des Arts et Métiers) s’inscrit dans la trace triangulaire d’une construction ruinée qui en définit précisément l’enveloppe volumétrique. L’essentiel du projet réside dans l’exploitation d’un paysage tout proche construit par les remparts (partiellement cachés par la ruine), par la fine tour de Buteveaux et par le cours discret du Médasson. La composition des plans est orientée pour cadrer visuellement les éléments forts et dominants du site.
Deux types d’espaces composent le pôle de restauration : les espaces techniques (livraisons, réserves et cuisines) et les espaces de réception (salles à manger, cafétérias et terrasses).
Au RdC, une longue salle à manger révèle de l’intérieur le rempart mis en valeur. Une large ouverture au Sud en cadrant le cours interrompu du Médasson (la petite rivière qui coule là) et la nouvelle école de danse toute proche, oriente les salles à manger vers la nouvelle rue.
A l’étage, la salle à manger est un volume étroit et vitré, décollé du rempart pour ménager une longue terrasse en bois, orientée vers la ville, à la lumière du sud-ouest. Cadré sur l’Abbaye, ce volume répond à la tour Butevaux toute proche en simulant une tour couchée. Depuis le jardin, cette disposition atténue, l’impact visuel de l’étage qui sert d’appui à une lente toiture couvrant le reste du triangle.
Chaque façade participe à l’articulation de situations contextuelles différentes:
La façade sud-ouest ouvre les salles à manger sur la ville.
Au sud-est, rue Porte de Paris, c’est une façade moins ouverte. Quelques ouvertures soulignées par des encadrements de pierre s’inspirent et jouent avec celles des pignons conservés et restaurés.
Sur le jardin, côté ENSAM, un rideau de câbles tendus entre sol et auvent tamise en le végétalisant (plantes grimpantes) le niveau bas. Il laisse entrevoir salles à manger et accueil en dissimulant de façon aléatoire des fonctions plus confidentielles. Cette double façade poreuse, crée sous un large auvent une galerie pour les attentes extérieures. Elle tempère la franchise du collage d’un bâtiment neuf confronté à l’autorité d’un monument.
Côté jardin, salle de réception et salle de repos s’ouvrent sur le parc de l’ENSAM. Les salles à manger des étudiants (haute et basse) privilégient plutôt des vues échappant au contexte scolaire.
Le plan obéit à une organisation rationnelle et compacte qui recherche l’efficacité et le confort du personnel tout en répondant aux règles de fonctionnement et d’hygiène attachées à un restaurant universitaire. La cuisine située dans une configuration centrale et rectangulaire trouve zénithalement une lumière naturelle.
Les matériaux sont choisis en connivence avec le site. Ils répondent au besoin de distinguer clairement les parties neuves des parties patrimoniales dans une relation contrastée et non agressive. Plus que des matériaux, ce sont des matières capables de donner à la construction un aspect inamovible, portant en elle son propre vieillissement : Ceci nous conduit à des textures primitives et légères (menuiseries en acier et peaux en acier autopatinables) pouvant se greffer, juste en l’effleurant, au tissu médiéval.
Ces plaques d’acier de 3mm d’épaisseur constituent la vêture qui enveloppe la totalité du bâtiment. Elles recouvrent et colorent les toitures, les façades et le volume de l’étage. Des lamelles de bois, disposées à claire voie, créent à l’intérieur des transparences filtrées qui reçoivent en écho la richesse du site. La conjugaison combinée de ces matériaux teinte le bâtiment à la façon d’une écorce de bois et répondent ainsi à la sensibilité du lieu autant qu’à sa qualité patrimoniale.
L’aspect buvard de cette peau permet, et, c’est son paradoxe, à l’enceinte précieuse d’absorber visuellement la construction neuve venue combler ponctuellement un segment disponible. Ainsi, ce paysage historique de pierres et d’enduits n’est en rien troublé par cette matière métallique qui évolue au fil du temps, et, plus immédiatement, aux variations de la lumière. Enfin, l’imperfection de sa mise en œuvre appuie involontairement l’idée d’un édifice malmené par le temps, mais installé depuis longtemps dans la pérennité.
Surface : 1230 m²
Coût des travaux: 2 900 K€ HT
Livraison : Octobre 2009