LA BULLE ENCHANTEE. Une crèche en zone industrielle.
Le projet s’inscrit dans une parcelle dégagée dans une zone industrielle à faible densité bâtie. La seuleréelle nuisance retenue est celle du bruit généré par la circulation automobile au nord de la parcelle. C’est donc avec un sentiment de liberté totale que nous nous sommes engagés dans la conception de ce projet.
Notre première intention était d’offrir un bâtiment protecteur et protégé, pour le confort et la sécurité desenfants, mais aussi pour la quiétude de leurs parents. Notre deuxième intention était d’introduire la notionde double-échelle intérieure du bâtiment, celle des enfants et celle des adultes, car nous ne perdons pas devue que ce sont d’abord les enfants qui constituent la matière vive de cet établissement. Enfin, notre troisième intention était de trouver un moyen de fragmenter la perception du bâtiment. En effet, les exigences
programmatiques imposent un développement de plain-pied des 1350 mètres carrés du projet... Quelque soit alors le traitement de façade, on se retrouve vite avec une «galette» aux proportions peu alléchantes et nous avons voulu éviter cela. Voici donc comment selon ces trois axes de réflexion nous avons élaboré le projet:
Un modèle cellulaire, concept utérin:
Nous avons imaginé l’ensemble comme un organisme cellulaire, avec son noyau (la crèche), son cytoplasme (ses jardins), et sa membrane (son enceinte). Premier élément: l’enceinte. Constituée d’un mur continu de forme douce et arrondie, elle délimite clairement l’établissement. Elle possède une liaison et accès unique avec l’espace public pour les enfants et les visiteurs ce qui favorise autant la sécurité que la surveillance, deux aspects fondamentaux d’un tel programme. L’entrée «vaginale» est marquée par une voûte en béton projeté, prolongement du muret. Deuxième élément: la crèche. Flottante dans son enceinte, elle accueille le visiteur dans un espace rayonnant autour d’un patio couvert, distribuant équitablement les différentes unités de vie des enfants. Ce concept d’espace de transition déambulatoire et centripète annule tout effet de couloir, comme tout effet de début et de fin de circulation. Il permet dès l’entrée d’embrasser du regard tous les accès disponibles, ce qui a pour effet de renforcer encore l’efficacité de surveillance, ainsi que de faciliter au maximum l’orientation du visiteur. Par ailleurs, en plus du travail poussé sur l’intériorité du bâtiment (concept utérin), nous avons conservé des vues traversantes depuis le centre jusque l’extérieur, comme par exemple la vue depuis le sas qui permet de voir le jardin de l’autre côté du bâtiment. Troisième élément: les jardins. Les unités de vie des enfants se développent en éventail, idéalement déployé au Sud.
Chacune s’ouvre naturellement sur son propre jardin, au bout duquel nous retrouvons l’enceinte comme délimitation. Cette disposition offre un bâtiment dont l’évacuation sur l’extérieur est des plus aisées et à la fois contenue, sans aucun débordement sur la voie publique. Le site étant proche d’une voie de contournement, les locaux techniques et administratifs au nord servent de filtre anti-bruit, afin de maximiser le confort des enfants.
La double échelle:
Afin de mettre l’enfant à son aise, nous avons fixé la hauteur intérieure de référence à 2,10 mètres. C’est un plafond bas destiné à créer des espaces adaptés aux enfants. Néanmoins, pour que notre idée fonctionne, nous l’avons combinée avec un jeu de plafonds à 4,20 mètres pour créer une variété d’espaces et de volumes. Ainsi par effet de contraste les zones de plafond bas sont perçues comme des niches protectrices.
C’est pourquoi l’espace de transition ainsi que les unités de vie ont des apports lumineux en haut jour, créant le contraste entre des espaces bas à éclairage modéré et des espaces hauts baignés de lumière naturelle.
La transition entre les deux niveaux se fait en douceur par un jeu de courbes, générant une réverbération variable des plafonds. Les espaces fonctionnels dédiés aux adultes (techniques et administratifs) sont fixés à une hauteur conventionnelle de 2,50 mètres.
La fragmentation du bâtiment:
S’agissant d’enfants, et dans l’idée d’introduire la perception d’une échelle domestique dans l’établissement pour effacer l’aspect péjoratif «d’équipement public» que pourrait avoir le bâtiment par ses proportions, nous avons eu l’idée de l’habiller d’un manteau végétal de bambous, ne laissant apparaître que de grandes lucarnes venant prendre la lumière. Le résultat est la perception d’un buisson de bambous duquel, de façon ludique, dépassent aléatoirement et dans des dimensions variées des boîtes aux proportions de maisonnette.
Cette idée n’a pas qu’une fonction esthétique: le manteau de bambous par son ombre protège les
façades de la surchauffe et les lucarnes jouent un rôle de casquettes permettant la régulation de l’apport d’énergie en fonction des saisons.
Au-delà de la symbolique forte de l’expression formelle d’inspiration organique et anatomique, l’approche environnementale du projet traite avec pertinence et un haut niveau de performance les aspects suivants:
- le confort acoustique et thermique des utilisateurs en toute saison,
- l’efficience énergétique en vue de la réduction des charges d’exploitation et des émissions polluantes,
- le traitement sur la parcelle des eaux de toiture,
- un «chantier vert» à faibles nuisances
Le projet s’inscrit donc dans le cadre d’une démarche de qualité environnementale globale du bâtiment, volontaire et initiée par la maîtrise d’ouvrage. La démarche environnementale consistait entre autre en un chantier à faibles nuisances - l’ensemble des entreprises a ainsi participé à des réunions de sensibilisation organisées par la maîtrise d’oeuvre préalablement au chantier, l’utilisation de matériaux à faibles impacts environnementaux, une isolation performante réalisée en briques de terre cuites à joints collés, d’un isolant extérieur de 15 à 20 cm et d’une toiture à végétalisation semi-extensive, la production d’ECS solaire, un chauffage par pompe à chaleur réversible sur sondes géothermales, une ventilation double-flux, des protections solaires efficaces sur l’ensemble des ouvertures, la gestion des eaux pluviales sur la parcelle (arrosage des bambous par le surplus d’eau de toiture)... Une attention particulière a été portée sur l’étanchéité à l’air du bâtiment et deux tests d’infiltrométrie ont été réalisés afin d’améliorer les performances du bâtiment.