Lycée Alphonse Daudet
Casemate et Tradition.
La double extension du lycée Alphonse Daudet à Tarascon pose la question de la responsabilité de la construction en site remarquable.
Lycée construit en 1933 par Gaston Castel (Grand Prix de Rome), inscrit sur l’inventaire des monuments historiques ;
Caserne Kilmaine, site classé monument historique, construite en 1718, par l’Architecte Desfour.
L’intervention bâtie considère la mémoire du site et l’identité territoriale comme autant d’éléments narratifs, prolongation de sa morphologie.
Dans un site riche d’histoire, au sein d’un équipement dont le rôle est de transmettre nos valeurs laïques et républicaines, il n’y a pas de place pour la suffisance et les gestes architecturaux pompeux.
L’ordre spatial résulte d’une intégration des contraintes programmatiques et contextuelles, en un processus unique d’engendrement de la forme. Les façades se conforment aux règles de composition de la caserne ; socle, contrefort, minéralité, répétition des ouvertures épurées suivant un module de percement répétitif, subtile allégorie de la meurtrière. Le béton pioché, teinté dans la masse, mis en oeuvre sur l’ensemble des constructions, dénonce la vanité des effets d’écritures architecturales et rend hommage aux traditions constructives militaires, massives, robustes, sobres, efficaces.
Pas d’exploits plastiques ou de préciosité matérielle.
Les bâtiments, forts de leur abstraction, s’adressent aux seuls éléments permanents du site.
On est dans la manière, le procédé particulier, pas dans le maniérisme affecté.
Deux considérations caractérisent la conception des bâtiments :
l’une concerne le statut de l’image et son efficience symbolique dans la mise en espace et dans la cristallisation des intentions ;
l’autre implique la tradition tectonique séculaire et l’usage sémantique de la construction comme vecteur de cohésion et de lisibilité de l’objet bâti.
Tout se joue dans l’ambivalence de la perception des bâtiments.
S’écrivant dans une forme singulière, monolithique et minérale. Leur géométrie taillée à la serpe assume ses formes muettes, jusqu'à les revendiquer en tant que dispositif, en
parfaite symbiose avec le site.
Comment rendre un bâtiment crédible à une époque qui croule sous les icônes et les contrefaçons, façon marché de Ventimille ?
Pas dans l’art du clonage élevé en stratégie de communication.
Pas en usant et en abusant de procédés architecturaux ou d’écritures convenus justifiant l’appartenance, l’implication et la reconnaissance d’un système culturel nombriliste vide de sens.
Le projet d’architecture est comme une belle femme, inventer c’est entretenir le désir.
Il est un lieu commun de dire que le bâtiment est BBC.
Aujourd’hui des TOC (troubles obsessionnels compulsifs) existent dans notre métier, si vous lancez BBC à un bureau d’étude, il vous répondra généralement : " doublage par l’extérieur, bardage et chaudière bois ".
Vous vous rendez compte des dégâts et de la responsabilité biblique que portent maintenant les BET sur leurs épaules ?! Sauvez nos enfants !
N’ayez crainte, le béton a encore de beaux jours devant lui.
"Le jour, c’est la vie des êtres, mais la nuit, c’est la vie des choses". Alphonse Daudet, Lettres de mon moulin